Politique

Le Baromètre des Décideurs – Décembre 2021

Régression contracyclique du moral économique

Sous le retour pandémique : nouveau cycle de tensions et aspirations inédites

La voie était tracée. Depuis un an, en octobre 2020, le moral des décideurs était engagé sur une impressionnante dynamique, progressant de l’indice -48 à l’indice -12 ; la qualité des perspectives économiques, les espoirs nourris par la campagne présidentielle pouvaient laisser présager d’une poursuite de cette dynamique positive.

Pourtant, cette nouvelle livraison du Baromètre des décideurs Viavoice HEC Paris – Le Figaro révèle au contraire un net repli, l’indice du moral perdant subitement 8 points et s’établissant à -20. Et cette régression contracyclique n’est pas uniquement imputable à la cinquième vague épidémique.

Le retour des doutes : un moral en baisse pour la première fois depuis treize mois

Concrètement, cette régression du moral économique procède d’une décrue sur les différents registres :

  • Concernant les perspectives sur le niveau de vie : 54 % des décideurs et près de 6 Français sur 10 (59 %) considèrent que celles-ci vont se dégrader d’ici un an ;
  • Alors qu’elles s’amélioraient depuis un an, les anticipations en matière d’emploi se dégradent : 46 % des décideurs et 52 % des Français pensent que le nombre de chômeurs augmentera dans les mois qui viennent ;
  • Plus d’un Français sur deux (+ 11 points par rapport à septembre 2021) et 40 % des décideurs estiment que leur situation personnelle va se dégrader au cours des mois à venir.

Sur le plan professionnel, les indicateurs sont aussi orientés à la baisse :

  • Une nette fragilisation de la motivation des collaborateurs, dont 52 % des décideurs (+ 8 points depuis septembre) font le constat ;

Symbole de cette confiance ébranlée, les perspectives d’opportunités pour faire progresser la carrière accusent le coup : 70 % des Français en activité professionnelles et 68 % des décideurs considèrent qu’elles sont faibles.

Sous la « cinquième vague », l’intensité des nouvelles tensions financières et sociétales

La tentation est grande d’imputer ce repli actuel à l’affirmation de la « cinquième vague » de la pandémie de Covid, et à l’irruption planétaire du variant « Omicron ».
Pourtant, les indicateurs de conjoncture économique (prix de
l’énergie et des biens de consommation courante, retour des tensions inflationnistes) et les résultats obtenus dans le cadre de ce baromètre révèlent des facteurs plus profonds :

  • Financiers : par rapport « au même moment l’année dernière », 41 % des Français se déclarent « moins à l’aise financièrement », ainsi que 31 % des décideurs ;
  • Sociétaux : de manière frappante, seuls 11 % des Français s’estiment « optimistes : l’économie se redresse et la crise semble derrière nous », et 63 % s’affirment « inquiets en raison de l’état social du pays ».

Facteurs de relance souhaités : le singulier alliage « baisse des prélèvements » et « vaccination »

Face à cette spectaculaire dégradation, décideurs et grand public en appellent d’abord à une relance par une baisse des prélèvements.

  • Les Français aspirent prioritairement à une baisse des prélèvements sur les ménages (49 %, + 5 points depuis septembre), une augmentation du Smic et des minimas sociaux (40 %) ainsi que des avantages pour les entreprises dont la production est située en France (40 %) ;
  • Les décideurs aspirent également en priorité à une baisse des prélèvements sur les ménages (+ 13 points depuis septembre), à favoriser la production locale en accordant des avantages aux entreprises qui produisent en France (43 %) et à une simplification des règles qui pèsent sur les entreprises.

En outre face au regain épidémique, la troisième dose généralisée du vaccin est considérée comme utile par trois décideurs sur quatre et par 65 % des Français. Enfin, s’agissant des acteurs attendus pour la sortie de crise, une prime est accordée aux entreprises et à l’innovation pour les décideurs (31 %), et aux consommateurs et à la dépense des ménages pour le grand public (35 %).

Solutions économiques : un nouveau match Emmanuel Macron Valérie Pécresse

A quatre mois du premier tour de l’élection présidentielle s’installe un nouveau match, peu envisagé jusqu’ici : de manière très singulière, « pour améliorer la situation économique de la France », les Français accordent une confiance égale à Emmanuel Macron et à Valérie Pécresse (34 % à chacun, la présidente de la Région Ile-de-France recueillant sur cette question un score en progression de 7 points). Les décideurs situent également ces deux personnalités en tête de leurs préférences : Emmanuel Macron à 48 % et Valérie Pécresse à 40 % (les interviews ont été réalisées du 3 au 7 décembre, pour l’essentiel après la victoire de Valérie Pécresse au Congrès LR).

Ces données signifient non seulement que le jeu politique se diversifie en vue de 2022, mais encore que le match des crédibilités économiques est désormais très ouvert, et que la candidate LR apparaît comme une compétitrice jugée tout à fait légitime en regard du président de la République actuel.

A l’heure des fêtes de fin d’année : tensions sur le pouvoir d’achat

La question du pouvoir d’achat s’est imposée comme centrale en termes d’attentes ces dernières semaines : à l’approche des fêtes de fin d’année, cette actualité devient d’autant plus sensible : 28 % des décideurs et un Français sur trois envisagent de moins dépenser que l’année dernière…

En ce mois de décembre 2021 s’ouvre ainsi une conjoncture d’opinion économique et politique totalement nouvelle : au repli du moral économique, porté par un faisceau de facteurs, font écho des appels à des solutions fortes, et s’installe un match Emmanuel Macron Valérie Pécresse. Ainsi surgissent, simultanément, de nouvelles inquiétudes et des espoirs renouvelés.

A cette rupture dans le temps s’ajoute une campagne présidentielle d’une nature totalement inédite, où se conjuguent les trois courbes mobiles du moral économique, des contaminations et des intentions de vote. Et les unes varient aussi vite que les autres, s’influençant toutes ensemble.

2022 sera une « Covid élection », sur fond de fluidités sanitaires, économiques et politiques.

Par :
Adrien Broche
François Miquet-Marty
Publié le 15/12/2021

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